Conservatrice-restauratrice de peintures / Diplômée de l'Institut national du patrimoine (Inp)
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Recherches autour des détrempes sur toile

 

LES DÉTREMPES SUR TOILE

La production de détrempes sur toile explose dans l’Europe du XVè siècle et se développe sous une multiplicité de variantes – tüchlein nordiques, voiles de Carême, bannières de procession, décors éphémères, toiles de volets d’orgue. Leur technique d’exécution rapide, sur toile non préparée et souvent libre, permet la réalisation de très grands formats économiques et facilement transportables. Ces peintures présentent un caractère graphique et spontané : la couleur est simplement détrempée à l’eau et la surface n’est pas vernie.

Ces caractéristiques matérielles confèrent à ces oeuvres une grande fragilité ayant conduit à leur disparition massive et impliquent des difficultés techniques majeures pour leur restauration.

CAS TRAITÉS

Lien vers la liste de travaux

Mon parcours sur ces oeuvres

Je travaille depuis bientôt 20 ans sur la problématique de traitement des détrempes et notamment sur l’épineuse question du nettoyage de ces œuvres. J’ai pu mettre au point un procédé permettant la restauration du corpus des toiles peintes du Musée des Beaux-Arts de Reims (de 2011 à 2020) qui apparaît comme l’ensemble le plus important de détrempes françaises réalisées autour de 1500.

J’interviens également sur des cas plus isolés (Scènes de la Passion du Christ, 1500, Musée de la Cour d’Or de Metz ; Christ en majesté et le tétramorphe, 1501, Hospices de Beaune) ainsi que sur des détrempes plus tardives (La Clémence et la Paix de J. Réattu, 1795 - Equipe David Prot).

Actuellement, ce procédé est transposé à ultra grande échelle pour la restauration des toiles peintes des volets d’orgue de la Cathédrale Saint-Jean-Baptiste de Perpignan, 1504 (Groupement Amoroso-Waldeis). Il s’agit dans ce cas de procéder au nettoyage aqueux de plus de 160 m2 de détrempe.

LIENS MéDIAS

Publication Technè en intégralité (2015)

Actes du colloque JRA-JERI en intégralité (2018)

Journées d’étude, C2RMF, Amiens 2021 en intégralité (2021)

Copyright C2RMF

Dispositif de nettoyage en cours d’installation - Scènes de la Passion, anonyme, fin XVè, Musée de la Cour d’Or, Metz © C2RMF

RÉSUMÉ DE LA PROBLÉMATIQUE

Le défi à relever sur ces œuvres consiste à nettoyer à l’eau des œuvres excessivement sensibles à l’eau. En effet, ces peintures sont constituées d’un liant en solution aqueuse (protéines de collagène ou polysaccharides) qui demeure soluble dans l’eau, encore des siècles plus tard. Par ailleurs, la configuration physique de la matière, sa porosité ainsi que sa sensibilité à l’abrasion excluent toute action mécanique. Le champ d’intervention possible est donc considérablement réduit et aucune solution satisfaisante n’avait été trouvée.

Il était donc impératif d’innover. Pour y parvenir, j’ai détourné un matériau entré dans le champ de la restauration textile. Il s’agit de membranes cellulosiques, similaires à des membranes à dialyse, mais fabriquées par l’industrie agroalimentaire pour servir de peau de mortadelle. Les qualités physiques de ce matériau optimisent les phénomènes de capillarité et d’osmose ionique et assurent ainsi un contrôle optimal de l’eau, gage d’innocuité pour l’œuvre, ainsi qu’une captation efficace de la crasse.

Ce procédé a permis de réaliser avec succès le nettoyage aqueux de plus d’une vingtaine de détrempes française de très grand format.

En haut : oeuvre avec partie inférieure nettoyée Jésus couronné d’épines / La Flagellation, anonyme, vers 1500, Musée des Beaux-Arts de Reims. En bas : boyaux avant nettoyage et après nettoyage.

Vue générale avant et après restauration - Siège et famine de Jérusalem, anonyme, vers 1500 - Musée des Beaux-Arts de Reims (oeuvre d’environ 12 m2).